Elisabeth Borne a présenté mardi 10 janvier le projet de réforme des retraites du Gouvernement. Cette réforme qui allonge la durée de cotisation, se veut “plus juste, notamment pour les femmes” selon la Première ministre. Mais l’est-elle vraiment ?
Les points principaux de la réforme
Le projet prévoit l’âge de départ à la retraite à 64 ans au lieu de 62 actuellement. Il prévoit également l’allongement de la durée de cotisation avec le passage à 43 ans de cotisation pour une retraite à taux plein. Le minimum retraite serait revalorisé avec une augmentation de 100 euros par mois pour les revenus autour du SMIC (pension de 85 % du SMIC net). L’âge d’annulation de la décote restera à 67 ans.“C’est une protection pour les plus modestes, pour celles et ceux qui ont eu des carrières hachées ou incomplètes – le plus souvent des femmes”, a précisé la cheffe du Gouvernement, qui déclare la réforme plus juste pour les femmes. Enfin, les périodes de congé parental seront prises en compte.
Le système de décote plus injuste pour les femmes
Avec le système de décote (coefficient de minoration qui s’applique au taux de la pension de retraite dès lors que les conditions ne sont pas réunies pour partir à taux plein) les femmes sont déjà contraintes, plus que les hommes, de liquider leurs droits vers l’âge de 65 ans et au-delà. En effet, les carrières des femmes sont plus souvent incomplètes, hachées ou à temps partiel (31 % des salariées) en partie parce qu’elles donnent naissance ou qu’elles se “sacrifient” pour le mode de garde des enfants. Selon la DREES, la Direction de la Recherche, des Études, de l’Évaluation et des Statistiques, pour la génération de 1950, 44% des femmes sont parties à la retraite avec une carrière incomplète, contre 32% des hommes. 19% des femmes contre 10% des hommes attendent l’âge de taux plein pour partir à la retraite.
Inégalité des salaires = inégalité des pensions de retraite
S’ajoute à cela, l’inégalité des salaires. Même si l’écart tend à s’amenuiser, les femmes gagnent encore 22 % de moins que les hommes à expériences et emplois égaux (INSEE 2022). En conséquence, les pensions de retraites sont de 30 % inférieures à celles des hommes, selon la direction de la recherche du ministère du travail. La réforme des retraites ne semble pas prendre en compte ce paramètre, alors que la lutte pour l’égalité femmes-hommes est une cause défendue par Elisabeth Borne.
Dans un rapport de 2022 du COR, le Conseil d’Orientation des Retraites, le taux de pauvreté des femmes retraitées est plus élevé que celui des hommes (10,4 % contre 8,5 %), et l’écart a tendance à se creuser depuis 2012. La baisse en cours du niveau des pensions par rapport aux salaires, conséquence des réformes précédentes, atteint de manière plus grave les plus faibles pensions des femmes.
Les défenseur.eures du droit des femmes reconnaissent l’injustice de cette réforme pour les femmes
Elisabeth Borne affirme qu’en maintenant à 67 ans l’âge d’annulation de la décote, le gouvernement “protège les femmes”, alors que beaucoup (syndicats, politiques, collectifs féministes,…) estiment que cette réforme est injuste pour les femmes et pourrait même accentuer leur pauvreté pour les plus précaires.
Manifestation prévue le 19 janvier
Selon un sondage IPSOS pour BFMTV publié le 7 janvier 2023, 79% des Français sont opposés au report de l’âge légal de départ à la retraite. 58 % des Français soutiennent la mobilisation et 16 % sont même prêts à aller manifester (BVA). Le 19 janvier prochain, une grande mobilisation est organisée par les huit principaux syndicats s’opposant à cette réforme. Une marche, initiée par La France Insoumise aura lieu le 21 janvier.