Valérie Pécresse (Les Républicains), Anne Hidalgo (Parti Socialiste), Nathalie Arthaud (Lutte Ouvrière), Marine Le Pen (Rassemblement National),… Quatre femmes se présentent parmi les douze candidats à l’élection présidentielle. Ça ne s’était encore jamais vu en France. Mais les Français.es sont-ils/elles prêt.es à élire à la tête de l’Etat une femme ? Il semblerait que les stéréotypes aient encore la dent dure, même au 21e siècle.
Le régime présidentiel ne favorise pas l’élection d’une femme à la tête de l’Etat
Sur 200 pays du monde, seule une vingtaine de femmes sont cheffes d’Etat ou de gouvernement. Dix femmes dirigent des pays européens. Jamais en France, une femme n’a été élue présidente de la République. Seule Edith Cresson a été Première ministre du 15 mai 1991 au 2 avril 1992 sous François Mitterand.
La politique en France s’appuie sur le “virilisme”
Selon la podcasteuse politique et féministe Léa Chamboncel, “la politique est codifiée par la masculinité : on parle de duel, de rivalité…” Ce rapport est défini comme “viril”. Il faut être un guerrier pour pouvoir supporter les rapports de force liés au pouvoir et il faut être un chef, explique-t-elle dans son livre “Plus de femmes en politique !” aux éditions Belfond. La pensée semble certes un peu archaïque, mais il est vrai que la politique est restée pendant très longtemps le terrain de jeu des hommes. En effet, le droit de vote et d’éligibilité des Françaises date de 1944, En France, Arlette Laguiller (Lutte Ouvrière) a été la première à se présenter à une élection présidentielle en 1974. Ségolène Royal, investie par le Parti Socialiste a été, quant à elle, la première femme française à atteindre le second tour en 2007, et Marine Le Pen la seconde en 2017 face à Emmanuel Macron.
Le mouvement #Metoo changera-t-il la donne ?
Aujourd’hui, le contexte a quelque peu évolué, surtout qu’il s’agit de la première élection depuis #MeToo. La parole des femmes s’est déliée. Elles ont pris conscience de leur place dans la société. Le fait d’être une femme candidate est utilisé comme un argument de modernité par les grands partis comme Les Républicains et le Parti Socialiste. Tout comme Marine Le Pen qui utilise son état de femme et de mère de famille pour attirer l’électorat féminin.
Mais il y a aussi un autre élément : la question du renouvellement politique et de l’émergence de nouveaux partis. Je pense par exemple à la République en Marche et à La France insoumise qui ont profondément modifié le paysage politique. Ces partis ont bousculé les règles du jeu.
Au début, LREM a voulu mettre en avant des personnalités de la société civile même si on se rend compte désormais que tout cela a un peu disparu. Mais la société civile étant composée de 51 % de femmes, ce renouvellement passe donc par une présence féminine plus forte.
Un vote “utile” ou par “défaut” ?
Un sondage de l’Ifop mené en ligne du 7 au 8 décembre 2021 a révélé que 16 % des Français et Françaises répondent non à la question : « Seriez-vous prêt à voter pour une femme à la prochaine élection présidentielle ? »
Les Français.es seraient donc prêt.es à voter pour une femme. Encore faut-il, pour ces femmes, arriver à convaincre et à donner un coup de pied dans la fourmillière des préjugés qui ont encore la vie dure chez beaucoup de personnes, moins “modernes” qu’elles ne le disent. La question est de savoir maintenant si les Français vont voter pour une femme, pour un homme, pour un parti, par conviction ou pour un programme…
Ce que les candidates proposent pour les femmes
Valérie Pécresse, Les Républicains
.Mise en place de « juges spécialisés dans les violences intrafamiliales pour instruire les plaintes dans les 48 heures et prononcer des ordonnances de protection au plus tard dans le délai de 6 jours ».
.Ordonner le port d’un bracelet anti-rapprochement avant procès.
.Généralisation de la vidéoprotection dans les transports locaux pour améliorer la sécurité des femmes.
.Instauration des consultations mère-enfant pour que les femmes puissent bénéficier d’une consultation médicale en même temps que celle de leur enfant (bilans de santé et des examens de gynécologie).
. Mise en place un congé menstruel de deux jours sur avis médical.
. Baisse de la TVA à 2,1% sur les produits d’hygiène féminine et généralisation les distributeurs de protections périodiques à l’université.
. Contre l’allongement à 14 semaines du délai de recours à l’IVG. La candidate estime que les vrais problèmes sont “la difficulté d’accès aux centres IVG, l’insuffisance de gynécologues et de sages-femmes”.
. Placement de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes au coeur des conférences salariales organisées chaque année . « Dans les entreprises de plus de 250 salariés, chacun pourra connaître les rémunérations moyennes correspondant aux postes équivalents au sien, afin que les femmes ne s’autocensurent plus pour demander des augmentations ».
.Instauration d’une allocation familiale dès le 1er enfant (900€/an), revalorisation des allocations pour le 2e et le 3e enfant, création de 30 000 places de crèches et un vrai service public de la petite enfance en milieu rural.
.En faveur de la PMA (Procréation médicalement assistée), « à condition que l’enfant puisse connaître son origine à ses 18 ans ». Opposée à la GPA (gestation pour autrui), elle dénonce une « marchandisation du corps de la femme ».
Anne Hidalgo, Parti Socialiste
.Développement de centres d’accueil spécialisés sur tout le territoire, ouverts 24 h sur 24 pour les victimes de violences. Dans ces centres, les victimes pourront bénéficier des prélèvements médicaux nécessaires et décider ou non de porter plainte.
.Suspension automatique de l’autorité parentale si l’un des parents est reconnu coupable de violences intrafamiliales. Afin « de protéger la personne victime de violences, mais aussi les enfants témoins ».
.Viols jugés devant la cour d’assises et non au tribunal correctionnel.
.Pour lutter contre les discriminations salariales, inversement de la charge de la preuve sur les discriminations salariales. « Ce sera à l’entreprise de prouver qu’elle n’est pas coupable de discrimination en matière de salaires, sous peine de sanctions, comme dans certains pays européens ».
. Augmentation du SMIC de 15 % (bénéfice au deux tiers pour les femmes).
.Favorable à l’allongement du délai de l’IVG et suppression de la double clause de conscience qui autorise les médecins à refuser de procéder à une interruption volontaire de grossesse sans raisons médicales.
. Reconnaissance de l’endométriose (maladie qui touche une femme sur dix) comme maladie longue durée.
.Allongement du congé paternité à 4 mois « dont 6 semaines obligatoires afin que les hommes assument de plus en plus les tâches liées aux jeunes enfants ».
.Pour la PMA et contre la GPA. “J’ouvrirai véritablement la PMA à toutes les femmes, pour qu’en cas de PMA avec tiers donneur, les droits soient les mêmes pour un couple de femmes que pour un couple hétérosexuel”.
.Contre la GPA : “Sa pratique éthique est impossible dès lors qu’elle intègre une logique de marché qui s’approprie des relations humaines, permet de louer le ventre d’une femme et d’acheter un bébé, ouvrant la porte à la toute-puissance de l’argent et à l’exploitation de l’autre. Je ne pense pas qu’il y ait de manière éthique aujourd’hui de mettre en place la GPA.”
.Renforcement de la loi abolitionniste de 2016 sur la prostitution. La lutte contre le proxénétisme passe par « l’accompagnement social des victimes vers la sortie de la prostitution.
Marine Le Pen, Rassemblement National
.Arrêt de l’immigration massive qui permettra de réduire les agressions de rues : “les étrangers sont surreprésentés dans les attaques commises à l’encontre des femmes”.
. Considérer le harcèlement de rue comme un véritable délit. Inscription des personnes condamnées pour des faits qualifiés d’outrages sexistes au fichier des criminels et délinquants sexuels. Application d’une présomption de crédibilité aux victimes.
.Accentuation de la formation des professionnels concernés sur le harcèlement de rue : pompiers, policiers, magistrats.
.Augmentation des aides aux structures d’hébergement d’urgence pour accueillir les femmes et leurs enfants.
- .Défense du droit à l’IVG, sans l’encourager.
.Contre l’allongement du délai d’IVG de 12 à 14 semaines.
.Politique de soutien aux familles monoparentales » : doublement de l’allocation de soutien aux familles monoparentales qui passera de 116 euros par mois, aujourd’hui, à 230 euros.
.Mise en place d’un statut pour les femmes atteintes d’endométriose.
.Mise en place d’un plan national pour l’égalité salariale.
.Les sujets PMA et GPA doivent être décidés par la société et via le référendum d’initiative populaire.
- .Expulsion des travailleuses du sexe étrangères.
Nathalie Arthaud, Lutte Ouvrière
“Le combat pour le socialisme et la lutte contre l’oppression de la femme sont étroitement liés“. Sur son site internet, il est écrit : ” La lutte contre l’oppression des femmes fait partie de notre combat de militants communistes révolutionnaires “. Nathalie Arthaud entend donc continuer ce combat en s’opposant “à ceux qui remettent en cause le droit à l’interruption volontaire de grossesse ou encore aux pressions pour le port du voile”, par exemple. Elle est en faveur de l’abolition de la prostitution.